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C'est quoi être une Gaillarde ?
Nous sommes un dimanche midi, avant d’aller regarder le match France-Ecosse et sept Gaillardes se retrouvent autour d’un brunch pour parler de ce qui distingue « Les Gaillards » des autres équipes de rugby. « C’est bon t’as lancé l’enregistrement ? » Erwan qui s’est faufilé au brunch des Gaillardes ramène sa fraise. Gwen, dans sa meilleure voix de poissonnière, raille sur le mansplaining : « c'est bon ? c'est enregistré ? Il est lancé ton podcast sur les meufs là ? ». Les Gaillards, qui n’ont pu résister à l'attrait d’un moment de convivialité avec leurs coéquipières, sont gaiement réprimandés et ne diront plus un mot. Myriam, Coline et Amélie sont les plus anciennes de l’équipe. L’une ancienne vice-présidente, l’autre actuelle trésorière, Amélie quant à elle est partie s’installer dans le sud-ouest mais reste adhérente des Gaillards. Elles partagent leur ressenti avec Marion, Berry et Nelly, toutes trois arrivées l’année dernière et Gwen « Qu’est qui différencie « Les Gaillards » d’autres équipes pour vous ? » Myriam : J’ai joué pendant des années dans des équipes féminines, et c’était très cool mais comme il y a peu d'équipe, le niveau monte vite et la compétition avec. J'ai mieux trouvé ma place chez « Les Gaillards ». Comme il y a régulièrement des débutants, on peut jouer et s’amuser au rugby sans pression. On n'est pas les unes contre les autres pour des positions, des postes. Au contraire on a toutes intérêt à se voir progresser et on s’encourage. Nelly : « Les Gaillardes », on est les chéries. On a la chance d’être dans un environnement où on peut être à 100% nous-mêmes, sans jugement, et avec bienveillance. Bon, ça parle beaucoup de sexe, mais on ne peut pas dire qu’on n’est pas moins indifférentes ! Marion: Mais cette bienveillance dont tu parles c’est super important! Parce qu’au début, on arrive un peu stressée à l'idée de se retrouver avec une équipe de 60 gars. Et finalement, je crois que je n'ai jamais été autant respectée en tant que femme qu'avec eux, que ce soit sur le terrain ou dans les événements organisés par l’association. Berry : Nelly, est-ce que, ne jouant qu’au touch, tu as le sentiment d’être moins bien considérée dans l’équipe ? Nelly : Non pas du tout, c’est la bonne alternative quand on aime le rugby mais peur du plaquage. Le touch, c’est un sport mixte. Ça se joue à six avec minimum 3 filles sur le terrain. En réalité même si je ne veux pas jouer au plaqué, le coach et les joueurs m’encouragent à venir à n’importe quel entraînement et chacun apporte un peu de son attention pour que je m’intègre au jeu et c’est vraiment satisfaisant d’être entourée de ces belles personnes, toujours aux petits soins. Et puis quoi qu’il arrive je fais intégralement partie de l’équipe, ce n’est pas une question de niveau ou de choix de jeu. Et j’adore aller voir jouer « Les Gaillards » et les soutenir, encore plus quand l’une de vous est sur le terrain. Berry : Dans n’importe quel match, dès qu’une Gaillarde est sur le terrain, tout le monde dans les gradins scande son nom. Et on adore quand les autres ont l’opportunité de briller. Coline : Et puis c’est différent en termes de valeurs véhiculées de jouer avec des mecs... Non pas que le rugby féminin ne soit pas ancré dans une tradition féministe, c’est génial aussi, mais, quand tu joues aux Gaillards, tu joues avec des mecs, donc y’a un double défi. C’est un peu une revanche contre toutes les fois on a t’a dit que le rugby n’est pas un sport de filles. Amélie : Moi, je ne vois vraiment pas ça comme une revanche. Se mesurer à des mecs, c’est un plus, mais je ne suis pas venue aux Gaillards pour ça, et c’est pas l’image que j’ai envie de ressortir des Gaillardes. Pour moi, j’y vais pour porter une image féminine dans une équipe mixte, plus que pour montrer que les filles sont capables de… Coline : Oui, ce n’est pas la raison pour laquelle j’ai commencé le rugby mais, une fois que tu y es, et que tu joues avec des mecs, on te dit : « Ah ouais tu joues avec des mecs…respect ! » Myriam : Au bout d’un moment on a un changement de mentalité même par rapport à soi-même. Tu te dis : “La vache, je joue avec des mecs beaucoup plus baraqués que moi sans avoir peur !” Berry : J’aime particulièrement cet aspect de développement personnel. Peut-être plus sur le plaqué qu’au touch du coup, mais y’a un défi particulier à jouer avec des mecs. Personnellement, j’ai encore souvent peur sur le plaqué, mais je persiste parce que je vois bien que petit à petit je progresse. Je suis déjà capable de faire bien plus que quand je suis arrivée, et j’ai encore beaucoup de chemin à faire, mais c’est un défi pour moi. Et même quand je peux avoir des larmes de frustration ou de fatigue parce que j’ai encore des blocages, Les Gaillards perçoivent ça comme de la persévérance plutôt que de la faiblesse. Est-ce qu’on peut être Gaillarde et ne pas être féministe ? Coline : Ça me parait compliqué quand même… Gwen : Ouais, moi je déteste les femmes… [rires] Marion : Je ne me considère pas particulièrement féministe. Bien sûr, je m’oppose aux discriminations sexistes quand je les vois mais… Coline : Bah c’est que t’es féministe alors ! Marion : Ce que je veux dire c’est que je ne suis pas une militante féministe et c’est pas une identité que je revendique. En tout cas je ne crois pas qu’il puisse y avoir une quelconque étiquette qui disqualifie d’être Gaillarde. Je crois très fort dans les valeurs d’inclusivité du club. Gwen : Je vois ce que tu veux dire : être Gaillarde, ce n’est pas se revendiquer féministe. Chez Les Gaillards, y’a pleins de combats, je rajoute le mien et, au final, on se bat un peu tous pour la même chose, que ce soit les mecs ou nous. Coline : Les Gaillards sont quand même une équipe avec comme valeur de permettre à tout le monde de jouer au rugby, notamment les homosexuels, les femmes, les personnes non binaires ou transgenre. Pour moi, ce serait un non-sens de venir jouer aux Gaillards si on n’est pas aligné sur ces mêmes valeurs. Berry : Mais par principe la porte est ouverte à tou.te.s. Berry Greenland